Caroline & Rivière d'étoiles
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La course au désert

     -Caroline !

Elle se retourna, le visage illuminé par le soleil qui brillait dans la cour de récréation de l'école.

-Oui, Rivière d'Étoiles.

-Aimerais-tu m'accompagner à la grande fête annuelle de mon peuple ? Cette année elle a lieu dans un endroit splendide, au milieu du désert, au pied d'un de nos rochers sacrés.

-Avec plaisir, si c'est permis.

-Oui, puisque je t'invite. Et en plus, on peut emmener nos chevaux. Il paraît qu'ils organisent une course, au cours d'un des trois jours de fête. Une course d'endurance, réservée aux enfants de notre âge, dix à quatorze ans.

-Génial ! Mais on risque d'être les plus jeunes...

-Tant pis. On tentera notre chance.


Deux semaines plus tard, les deux amies se retrouvèrent parmi la foule, au pied du rocher sacré.

Les réjouissances attiraient du monde, beaucoup de monde.

Rivière d'Étoiles revêtue d'une belle robe brune cousue par sa maman, fixait ses longues tresses avec des rubans et des bijoux en turquoise. Nicole-Chelly, Bouton d'or et Poisson d'argent, ses trois petites sœurs, âgées respectivement de neuf, sept et quatre ans, étaient habillées de même. Tous les enfants portaient leur beau costume à la mode traditionnelle.

Partout se dressaient les tentes installées par les familles venues parfois de bien loin. Des échoppes vendaient des bijoux, parfois précieux, des boissons, des nourritures, des poteries ravissantes, des couvertures splendides. Ce n'était que couleurs, musiques, et cris de joie de ceux et celles qui se retrouvaient après un an d'absence.


Les deux amies s'arrêtèrent devant une tente bien particulière. Une banderole indiquait : « Grande course de chevaux. Inscriptions ». Elles entrèrent. Deux hommes âgés, assis derrière une table, les accueillirent avec un grand sourire.

-Pouvons-nous participer ? demanda Rivière d'Étoiles.

-Quel âge avez-vous ?

-Dix ans chacune.

-Alors, inscrivez-vous si vous le souhaitez.

-Mon amie Caroline n'est pas Amérindienne. Peut-elle quand même participer ?

-Tu l'invites. Si elle est venue avec son cheval, la réponse est oui.

-Merci, monsieur, dit notre amie.

-On peut faire équipe à deux ?

-On autorise les équipes par deux, trois ou quatre enfants. Rendez-vous demain, avant le lever du soleil, à cheval, au pied de notre rocher sacré. L'épreuve sera dure, je vous préviens. Vous ne pouvez emporter ni à boire ni à manger pour vous ou vos chevaux. Vous devrez vous débrouiller en cours de route.

-Il y a combien d'inscrits ? demanda Rivière d'Étoiles.

-Soixante-quatre, répondit le vieil homme. Soixante garçons et vous faites partie des quatre filles.

Les deux amies quittèrent la tente, très impressionnées.


Le lendemain, à l'aube, au pied du rocher sacré, le spectacle était à la fois solennel et sublime.

Il faisait encore nuit, mais les lueurs jaunes, oranges, à l'horizon éclairaient déjà les visages des chevaux et des enfants qui les montaient. Les soixante-quatre concurrents formaient une ligne à peu près droite, silencieuse, sauf parfois, une monture qui s'ébrouait.

Les cœurs battaient, émus pour les plus jeunes, fiers de participer, et inquiets chez les aînés de treize ou quatorze ans, mais qui savaient la rigueur de l'épreuve.

Nos amies se tenaient droites et décidées, chacune sur son coursier, qu'elles flattaient parfois de la main quand elles les sentaient trop nerveux.

Le sachem, chef de la course, passa devant tous en paradant. Puis, revenant en tournant le dos à la lumière derrière l'horizon qui annonçait l'imminence du lever du soleil, il prit la parole, haut et fort. 

 -Quand le soleil paraîtra devant vous à l'horizon, vous pourrez vous élancer. Vous parcourrez la longue pleine désertique vers la grande barrière rocheuse qu'il vous faudra franchir. À vous de repérer un passage. De l'autre côté vous irez jusqu'à Totem Pôle, ce rocher sacré qui ressemble à une cheminée solitaire au milieu des sables. Là vous donnerez votre nom aux contrôleurs de la course.

Tous écoutaient en silence. Le sachem reprit.

-Vous ne verrez ni route ni piste. Chacun de vous peut aller et venir où bon lui semble. Tout est permis au cours de la course. Tout. Le premier qui ramène son cheval, ici, après être passé à Totem Pôle, remporte la victoire.

Les regards se tournèrent ensuite vers l'horizon. La luminosité, de plus en plus éclatante, passa du rouge à l'orange. Quelques lignes blanches illuminaient le ciel qui déjà redevenait bleu. Le soleil parut, comme une coulée d'or sur la ligne de crête des collines de l'Est.

Ce fut alors une immense clameur suivie de « Yahoo! Yahoo! » criés par toutes les bouches vers le ciel et la plaine. Chacun s'élança, quittant la ligne de départ. Ce ne fut bientôt plus qu'un troupeau qui levait la poussière, une cavalcade qui filait et se perdait dans l'immensité infinie des déserts de l'Ouest.

 

Les deux amies chevauchaient côte à côte au milieu de la mêlée. Elles étaient noyées dans la poussière brune que ceux de tête levaient au rythme des sabots de leurs montures.

Un garçon s'approcha de Caroline, la menaçant de ses cris. Elle fit faire un écart à son cheval pour éviter un coup de pied. Le garçon revint à la charge et tenta de la faire tomber à terre en la poussant avec rudesse. Elle esquiva puis riposta en le frappant du poing dans le dos. L'agresseur s'éloigna, criant que la course devrait être interdite aux filles.

Nos amies décidèrent de prendre leurs distances, et de passer par un autre côté que celui choisi par la troupe des aînés, lancés à folle allure. Elles n'étaient d'ailleurs pas les seules à s'éloigner du peloton central formé par ceux de treize et quatorze ans.

-Tant pis si on arrive les dernières, lança Rivière d'Étoiles. Si on finit la course, ce sera déjà un fameux succès. On n'en demande pas plus.

-Oui, et ménageons nos chevaux, ajouta Caroline. La journée va être longue. On ne reviendra pas avant le soir, paraît-il.


La grande barrière approchait.

C'est une montagne plate, incontournable, haute de six cents mètres. Une paroi verticale, comme une falaise au bord de la mer, infranchissable, sauf en suivant à quelques rares endroits des sentiers étroits et vertigineux tracés par les Amérindiens autrefois.

Totem Pôle se trouve de l'autre côté.

Rivière d'Étoiles arrêta sa monture et scruta l'immense muraille un long moment en silence. La difficulté paraissait insurmontable.

-Là, dit soudain la jeune fille en pointant son doigt vers l'Est.

Caroline ne remarqua rien de spécial. Tout lui semblait roches verticales, démesurées, abruptes, et d'une incroyable hauteur.

-Là, répéta son amie. Plus à gauche. Je vois une crevasse, terminée par un tas de rochers difformes entassés les uns sur les autres. Ça me paraît plus vert que le reste. Il doit y avoir de l'eau en cas d'orage. Et un torrent à sec. Je crois qu'on pourra escalader par là avec nos chevaux.

-Je te suis, dit Caroline.


Elles descendirent dans un creux ensablé. Un wash, un de ces torrents des déserts, presque toujours à sec, mais envahis quelques heures par l'eau en cas d'orage sur les hauteurs où ils prennent leur source.

Elles l'empruntèrent, passant à tour de rôle l'une devant l'autre.

À gauche comme à droite, une barrière rocheuse se dressait, de plus en plus haute. Il fallait continuer ou faire demi-tour.

Un sentier étroit apparut sur le côté gauche. Il semblait se prolonger en zigzaguant à travers le titanesque écroulement de rochers. Les deux amies le suivirent.

Cela montait sans cesse et l'escarpement devint vertigineux. À gauche, la paroi rocheuse, verticale. À droite, un précipice sans cesse plus profond. À présent le moindre faux pas eût été mortel.


Caroline allait devant. 

Soudain, son cheval s'arrêta. Elle eut beau l'encourager et le flatter, il refusait d'avancer.

À cet endroit, impossible de faire demi-tour. Entre paroi verticale et précipice, le passage était bien trop étroit.

Notre amie se glissa le long de sa monture et mit pied à terre.

-Que se passe-t-il ? demanda Rivière d'Étoiles qui suivait à quelques pas.

-Mon cheval a peur. Il refuse d'avancer.

Caroline le flatta encore, elle lui parla à l'oreille. L'animal ne fit plus un pas en avant. Il ne voulait pas reculer non plus. D'ailleurs, avec le précipice à leur côté, c'eût été hasardeux.

Notre amie se rappela un passionnant récit d'aventure qu'elle avait lu.

Elle ôta son t-shirt et le plia dans le sens de la longueur. Elle plaça le bandeau improvisé sur les yeux de sa monture, puis flattant à nouveau son compagnon et lui parlant avec tendresse, elle prit le temps de le rassurer.

Tenant alors la bride avec fermeté, elle tira en douceur. Le cheval fit un pas en avant. Il faisait confiance à sa cavalière, qu'il connaissait et qui le soignait toujours avec amour.

Pas à pas, Caroline fit avancer sa monture, marchant elle-même à reculons, sans cesser de lui parler et le caressant de l'autre main. Elle réussit à l'amener tout en haut de la falaise, là où le terrain s'élargissait et devenait un plateau.

-Bravo, lança Rivière d'Étoiles.

Son amie sourit, fière. Elle reprit et remit son t-shirt.


De l'autre côté, la descente paraissait aisée.

Elles suivirent une piste, à peine dessinée, mais qui menait vers le fameux Totem Pôle qu'elles apercevaient au loin, au milieu des sables.

L'endroit était impressionnant. Ce rocher d'un à deux mètres à peine de diamètre, se dresse vers le ciel à une hauteur vertigineuse. Cet obélisque, aussi haut qu'une pyramide, pointe son doigt majestueux comme s'il indiquait le soleil.

Une tente, dressée au pied, semblait minuscule. Trois Amérindiens y attendaient le passage des concurrents.

Caroline et Rivière d'Étoiles arrêtèrent un instant leurs montures et se nommèrent.

-Combien sont-ils devant nous ? demanda l'une d'elles.

-Vous êtes onzième et douzième. Un groupe de quatre garçons vous précède. Ils avancent là-bas, au loin, vers la gauche. Parmi eux se trouve le vainqueur de l'an passé. Et trois fois deux autres garçons viennent de passer presque ensemble. Ils ont choisi d'aller vers la droite.

Nos amies virent à boire et à manger sous la tente. Caroline, déjà affamée, regarda la nourriture et les boissons avec envie, mais ce n'était pas pour elle.

Les deux amies s'éloignèrent.


-Nous voilà à mi-course et en très bonne position, réfléchit Rivière d'Étoiles. Que préfères-tu ? Aller à droite, et repasser par le sentier emprunté en venant, ou tenter notre chance à gauche ?

-Ceux qui vont là au loin à gauche connaissent un passage, puisque parmi eux se trouve le vainqueur de l'année dernière. Suivons-les de loin.

-D'accord. La route est encore longue. Nos chevaux ont aussi soif que nous. Il faudrait trouver de l'eau.


Pendant une heure, les deux cavalières avancèrent, longeant le pied de l'immense falaise qu'il faudrait tantôt refranchir. Les quatre garçons avaient disparu, mais nos amies suivaient les traces laissées par les sabots de leurs chevaux.

-Ils ont tourné, dit tout à coup Rivière d'Étoiles.

-Oui, ils empruntent ce canyon. Espérons qu'ils savent ce qu'ils font.

La vallée assez large creusait la barrière rocheuse. Le sol sablonneux s'encombrait çà et là de rochers tombés des parois verticales qui s'élevaient, à gauche comme à droite, à plus de cinq cents mètres de haut.

Parfois les traces des sabots disparaissaient sur les surfaces rocailleuses, mais toujours, elles reparaissaient un peu plus loin.

Une fissure à peine large de deux mètre apparut sur leur droite. Les deux filles allaient la dépasser mais Rivière d'Étoiles arrêta sa monture.

-Là, dit-elle. Allons-y, on trouvera de l'eau dans cette gorge étroite.

-Les garçons n'y sont pas allés, fit remarquer Caroline.

-Ils ne l'ont peut-être pas remarquée. Viens, suis-moi.


Elles entrèrent dans le passage étroit, impressionnant, presque sombre, bien à l'abri du soleil. Un peu plus loin, elles s'approchèrent d'un tank d'eau, une de ces crevasses profondes au milieu des déserts de l'Ouest, et qui, bien abritées, conservent de l'eau des mois après la pluie si rare.

Les deux aventurières descendirent de cheval et à quatre pattes, burent tout leur saoul. Les chevaux se précipitèrent à leur tour. Puis, sur le conseil de Rivière d'Étoiles, elles entrèrent dans l'eau, pourtant brune de la vase remuée, et s'y plongèrent habillées.

Les jeans, les t-shirt, les baskets, (Rivière d'Étoiles avait quitté sa belle robe amérindienne pour l'épreuve), tout y passa et se trempa. Elles en sortirent ruisselantes, mais rafraîchies et au frais pour une heure au moins.

Puis elles remontèrent sur leurs chevaux et quittèrent l'impasse étroite. Elles rejoignirent le canyon principal, retrouvèrent les traces laissées par les garçons et les suivirent.


Elles les rattrapaient. Ils s'étaient arrêtés à un endroit où la vallée se divise en deux et laissaient un moment leurs montures se reposer à l'ombre de la paroi rocheuse.

Nos amies s'approchèrent. Elles hésitaient. Fallait-il prendre à gauche ou à droite ?

Les garçons se redressèrent à l'arrivée des deux filles aux vêtements humides. Ils virent aussitôt que leurs chevaux avaient bu.

-Vous avez trouvé de l'eau ?

-Oui, répondit Rivière d'Étoiles.

-À quel endroit ?

-On veut bien vous le révéler, mais d'abord, vous nous dites s'il faut prendre à gauche ou à droite pour rencontrer un passage qui mène de l'autre côté vers la plaine.

Les garçons s'éloignèrent un peu et discutèrent à voix basse un instant. Puis ils revinrent.

-Il faut aller à gauche. Il y a un tunnel.

-Retournez en arrière, dit Rivière d'Étoiles. Vous apercevrez une gorge étroite à dix minutes d'ici. Vous y trouverez de l'eau dans un tank, un peu trouble suite à notre passage, mais bonne.

Les garçons montèrent à cheval et partirent suivant les indications des deux amies.


-Que choisit-on ? dit Caroline. On leur fait confiance et on va à gauche ? Ou bien, ils nous ont menti et on va à droite ?

Elles hésitaient. Caroline surtout se méfiait. Son amie était plutôt d'avis de suivre l'avis des garçons.

-Je crois qu'ils nous ont donné la bonne direction, dit-elle, mais je crains qu'elle présente un danger, un piège, ou n'importe quoi. Ils le savent mais n'ont pas voulu nous dire quoi.

-Allons-y et soyons prudentes.


Elles avançaient, seules à présent, dans la vallée.

Après un tournant, apparut une montée assez raide. Cela menait droit vers l'entrée d'un tunnel ou d'une grotte. Les deux amies y arrivèrent et descendirent de cheval.

-Je vais explorer cet endroit à pied, dit Caroline. S'il y a un piège quelque part, ce doit être ici. Attends-moi.

-Fais attention !

Notre aventurière entra dans la caverne. Cela se prolongeait en un long tunnel très sombre encombré de rochers bruns. Elle leva les yeux vers la voûte. Quelque chose remuait là-haut. Elle aperçut une grande quantité de chauves-souris.

-Le piège, murmura Caroline. Si l'on suit toutes deux ce couloir à cheval, ces chauves-souris, dérangées, s'envoleront. Nos chevaux terrifiés se cabreront. Les  bestioles, affolées à leur tour, nous attaqueront.

Elle sortit et rejoignit son amie.

-Ils ne nous ont pas parlé de ces animaux. Notre passage peut se révéler très dangereux si on les effraye. Que faire ?

-On n'est pas venues pour gagner, mais pour finir la course, répondit Rivière d'Étoiles. Cachons nos chevaux là, derrière ces rochers. Effaçons nos traces de pas et de sabots qui y mènent et attendons. Les garçons vont arriver et entreront les premiers. On verra comment ils s'y prennent.

Caroline saisit une touffe de plantes à épines et suivit son amie qui emmenait les chevaux vers la cachette repérée. Elle fit disparaître les signes de leur passage vers cet endroit, laissant croire qu'elles avaient continué tout droit dans le tunnel.

Elles attendirent en silence.


Les garçons approchèrent, trempés de la tête aux pieds. Leurs chevaux avaient bu. Ils s'arrêtèrent à l'entrée de la caverne.

-Elles sont passées, dit l'un d'eux.

-Pas possible, affirma un autre.

-Peut-être que les chauves-souris dorment... ou sont parties.

-Si les filles réussissent, nous le pouvons aussi, et dépêchons-nous. Elles sont devant et si cela continue, elles vont gagner la course. Il faut les rattraper.

Ils engagèrent leurs chevaux dans le boyau à toute allure. Mauvaise idée...

Caroline et Rivière d'Étoiles les virent disparaître. Elles attendirent encore un peu avant de se mettre en route.


Soudain, elles entendirent des cris, des hurlements. Les chevaux revenaient au galop. Les garçons tremblaient, pleuraient, criaient, hurlaient. Ils défilèrent en trombe, poursuivis par des centaines de chauves-souris qui volaient autour d'eux et affolaient leurs montures.

Deux d'entre eux, désarçonnés, roulèrent à terre. Leurs chevaux se sauvèrent, abandonnant leurs cavaliers. Les deux autres ne réussissaient plus à maîtriser leurs coursiers, blessés et terrorisés par l'attaque foudroyante des chauves-souris.

Les deux garçons tombés tentèrent de se relever, mais sans y parvenir, à cause de leurs blessures à la tête, au cou et aux bras. Leurs habits étaient déchirés.

Caroline et son amie s'approchèrent.

-Il faut les emmener à l'hôpital, et vite. Ces mammifères volants les ont mordus. Ils donnent parfois la rage.

-Venez, dit Rivière d'Étoiles. On va vous prendre sur nos chevaux et vous emmener au campement. Là on vous soignera.

Les deux filles les chargèrent. Ils n'en menaient pas large. Elles entrèrent à leur tour dans le tunnel.

Elles ne risquaient plus rien, les chauves-souris étaient parties.


Très vite, elles aperçurent la sortie. Une piste descendait en pente douce vers l'immense plaine au bout de laquelle se trouvait le campement des Amérindiens. Parfois, elle disparaissait entre des rochers dressés sur le sol, sans doute écroulés des hauteurs de la falaise.

Les deux amies suivirent un wash, bien à sec.


Caroline et Rivière d'Étoiles avançaient à présent dans la plaine. Elles se dirigeaient vers le lieu de rassemblement. L'état des garçons empirait. Leurs blessures saignaient encore et ils gémissaient, à moitié inconscients.

Des cavaliers arrivèrent. Des concurrents qui n'avaient pas réussi à passer la grande barrière ou qui avaient abandonné en chemin. Tous encourageaient les deux filles à finir la course. À l'Ouest, le soleil déclinait.

Les deux copines firent une entrée remarquée dans le campement. Elles se demandaient pourquoi ces bravos et ces hourras.

Elles s'arrêtèrent à la tente de contrôle et expliquèrent leur aventure en quelques mots. Les deux blessés furent emmenés à l'hôpital en ambulance.

Ensuite, elles apprirent qu'elles avaient gagné la course.

On les accompagna en triomphe et couronnées de fleurs. Elles en oublièrent un instant la soif et la faim qui les torturaient depuis des heures.

Elles voulurent s'occuper de leurs chevaux elles-mêmes, les faire boire et manger et les bouchonner, avant de participer au repas bien mérité dont elles furent les héroïnes.

Jamais, depuis plus de vingt ans, la course au désert n'avait été gagnée par des filles. Elles souriaient, fières et heureuses de leur victoire.