Magali
Retour Imprimer

Les Bonbons magiques

     Ce soir, on fête l'anniversaire de maman en famille.

Magali voudrait lui faire un beau cadeau, mais voilà, elle ne possède pas d'argent pour en acheter un au magasin. Comment pourrait-elle bien s'y prendre ?

Elle sortit de la maison et passa au jardin.

Magali a quatre ans et demi. C'est une petite fille très vive, radieuse, avec des cheveux tout noirs. Papa ou maman les lui coiffe en deux couettes qui dansent sur ses épaules. Elle porte souvent une salopette rouge et des baskets blanches.


De l'autre côté de la haie, au fond du jardin, se trouvent un champ de blé puis une petite rivière. Notre amie poussa la barrière et passa sur le chemin en terre qui longe ces prairies.

Elle vit des pâquerettes, des pissenlits, qu'elle appelle des petits soleils, et des boutons d'or. Elle en ramène souvent à sa maman. Mais aujourd'hui, elle préférait lui offrir quelque chose de mieux, pour son anniversaire.

Parvenue au bord du ruisseau, elle aperçut des très jolies fleurs sur l'autre rive. Malheureusement, pour traverser le cours d'eau, il faut entrer dans la boue, patauger dans la vase, et risquer de beaucoup se mouiller, car au milieu, cette rivière est plus profonde.

Magali soupira. Elle réfléchit. Si elle devenait un petit poisson, ce serait facile pour elle de traverser la rivière.

En regardant aux alentours, elle remarqua une étrange boîte ronde. Notre amie, intriguée, s'en approcha et la prit en mains. Elle contenait des bonbons de toutes les couleurs. 


Elle poussa sur le couvercle et entendit un léger ronronnement. Une partie mobile du boîtier tourna. Une petite boule rouge apparut au seuil d'une ouverture étroite.

Magali la prit et la regarda. Elle la lécha. Oui, c'était un bonbon au chocolat. Quelqu'un avait dû oublier sa bonbonnière près de la rivière. Elle le posa sur sa langue. 

Pendant qu'il fondait dans sa bouche, elle ressentit un vertige, comme la tête qui tourne. Elle ferma les yeux un instant, et quand elle les ouvrit, elle était devenue un petit poisson rouge, au fond du ruisseau.


Quelle chance! songea la fillette. Je vais pouvoir traverser la rivière et aller cueillir les belles fleurs pour maman, de l'autre côté.

-Fais attention, conseilla un petit poisson argenté qui passait près d'elle. Là-bas, entre les rochers, se cache une méchante écrevisse. Elle pourrait te prendre dans ses énormes pinces et te manger.

-Ça fait peur, s'effraya notre amie. Comment lui échapper ?

-Viens, on va nager jusqu'à l'étang. Elle ne nous rattrapera pas.

Et Magali-poisson rouge accompagna son nouvel ami. Ils fendirent l'eau jusqu'à la mare. Sauvés!


À présent, Magali tournait en rond dans l'eau de l'étang. Elle se rappela soudain l'anniversaire de maman. Elle ne voulait pas continuer à passer son temps entre les roseaux et les nénuphars. Elle allait tout rater.

-Comment réussir à quitter cet endroit ? Je veux assister à la fête. Si au moins, j'étais une grenouille, je pourrais sortir de l'eau et retourner à la maison.

À peine prononça-t-elle ces mots que notre amie aperçut, au fond du petit lac, dans la vase, la même boîte de toutes les couleurs. Elle s'en approcha et poussa sur le couvercle avec sa nageoire. Un bonbon jaune sortit.

Magali-poisson l'avala. Elle fut prise de vertiges comme tantôt et ferma les yeux. Quand elle les ouvrit, elle était devenue une grenouille jaune.


Quelle chance ! Vite, en route pour la maison. Elle y arriverait juste à temps pour l'anniversaire.

Notre amie sortit de l'étang. Elle se glissa dans la boue puis dans l'herbe et se dirigea vers son jardin.

Mais une grenouille n'avance pas très vite. Même une jaune ! Elle progressait par petits bonds. À cette vitesse-là, elle n'allait pas parvenir chez elle avant le soir!

-Je veux devenir un lapin, songea tout haut la fillette. Je pourrai courir bien plus vite. Je serai chez mes parents en quelques instants. Si je reste en grenouille, j'arriverai trop tard. Je vais rater la fête. 

À ce moment-là, elle vit à nouveau la fameuse boîte. Elle comprenait bien maintenant, qu'elle ne contenait pas des bonbons comme les autres.

Elle poussa sur le couvercle avec sa petite patte. La boîte tourna sur elle-même et un nouveau bonbon, un bleu, en sortit. Magali-grenouille jaune le mangea. Elle eut de nouveau la tête qui tourne et ferma les yeux. Quand elle les ouvrit, elle était un lapin bleu.

Après avoir été un poisson rouge, puis une grenouille jaune, la voilà devenue maintenant un lapin bleu.


Vite ! Elle courut aussi rapidement qu'elle put pour retourner à la maison. Mais elle se dépêcha tant qu'elle se perdit au milieu des arbres.

Elle essaya de trouver son chemin à gauche, à droite. Elle courut encore devant elle, puis revint sur ses pas. Elle se précipita ici et là, mais plus elle filait, plus elle se perdait dans la forêt.

Elle s'assit entre les racines d'un grand sapin et se mit à pleurer.

-C'est la fête de maman, et moi je suis perdue au fond des bois.

Puis, tout en larmes, elle songea.

J'aimerais me transformer en oiseau, une pie, un corbeau ou une mésange. Je volerais au-dessus des arbres. Je parviendrais vite chez mes parents.

La boîte aux bonbons magiques apparut. Magali-lapin bleu poussa sur le couvercle et en reçut un rose. Elle le mangea et fut prise de vertige. Quand elle ouvrit les yeux, elle était un oiseau rose.

Donc, après s'être changée en poisson rouge, elle était devenue une grenouille jaune, puis un lapin bleu et maintenant un oiseau rose.


Vite, elle s'envola et plana plus haut que les arbres de la forêt. Elle reconnut au loin son village et sa maison. Elle s'y rendit à tire-d'ailes sous le soleil. Elle volait si haut qu'elle faillit se cogner contre un avion qui passait.

Elle se posa dans l'herbe du jardin près de la porte de la cuisine et regarda par la fenêtre.

Papa et maman préparaient la table dans la salle à manger. Arnaud, le grand frère de notre amie, revenu de l'école, aidait ses parents en rangeant les cadeaux devant la cheminée. Bébé Julien jouait dans son parc. Tout le monde se réjouissait.

Magali entendit ses parents l'appeler, mais elle ne pouvait pas entrer dans la maison. Un oiseau ne peut pas ouvrir une porte avec ses ailes.

Elle se trouvait dehors, au jardin, et on la cherchait partout.

Songeuse, elle pensa :

Je voudrais devenir une petite abeille. Je passerais par le trou de la serrure et j'irais au salon. Je me poserais sur un coussin.

Magali-oiseau rose aperçut la boîte de toutes les couleurs entre deux plants de la haie. Elle poussa doucement sur le couvercle avec son aile. Le ronronnement se fit entendre, la boîte tourna et un bonbon violet en sortit. Elle le croqua aussitôt.

Elle ressentit de nouveau que sa tête tournait et ferma les yeux. Elle se transforma en une abeille violette. Elle n'eut aucune difficulté à passer par le trou de la serrure et à entrer dans la maison.

Elle vola vite jusqu'au salon et se posa sur un des fauteuils.


-Magali, Magali, criait papa. Mais où es-tu ? Dépêche-toi. Nous t'attendons pour fêter maman.

-Je suis ici, répondit notre amie.

-Où ça ? On ne te voit pas.

-Ici, sur le fauteuil.

Arnaud, papa et maman regardèrent autour d'eux. Ils ne virent pas Magali-abeille violette dans le fauteuil.

-Je suis sur le dossier, près du coussin.

Les parents effrayés découvrirent leur fillette métamorphosée.

-Que se passe-t-il ? Comment es-tu devenue une abeille ? demanda papa.


Notre amie raconta son aventure.

-Je voulais te faire un beau cadeau pour ton anniversaire, maman. Des très jolies fleurs se trouvaient de l'autre côté de la rivière. Alors, grâce à la magie d'une boîte, je suis devenue un poisson rouge pour traverser le ruisseau.

-Ma chérie ! s'exclama maman.

-Je ne pouvais plus sortir de l'eau. En reprenant un bonbon magique je me suis transformée en grenouille jaune. Mais je ne sautais pas assez vite pour revenir à temps à la maison. Alors je me suis changée en lapin bleu. Mais je courais trop vite et je me suis perdue dans les bois.

-Pauvre trésor, fit papa.

-Ensuite, avec un autre bonbon, je suis devenue un oiseau rose. Hélas, impossible d'entrer dans la maison. Mais en abeille violette, j'ai pu passer par la serrure.

-Moi, je veux retrouver ma petite fille, dit maman, et pas une abeille, même violette.


Tous cherchèrent la fameuse boîte. Elle demeurait introuvable. Ils regardèrent sous la table, sous les chaises et sous l'armoire. Ils vérifièrent le grand divan et ses coussins. Ils montèrent même dans les chambres et fouillèrent la salle de bains.

Tout à coup, ils s'aperçurent que bébé Julien, le petit frère, tenait la boîte dans ses mains. Il poussa tellement fort sur le couvercle avec ses petits doigts, qu'un bonbon en sortit.

Magali-abeille violette le mangea et redevint la petite fille qu'elle était au matin. Son papa la prit aussitôt dans ses bras.

-Je n'ai hélas pas de cadeau pour toi, maman, dit notre amie en tournant la tête.

Maman la rassura en la cajolant très fort à son tour. Elle lui donna un gros bisou.

-Ma chérie, le plus beau cadeau du monde, c'est de pouvoir serrer ma petite fille dans mes bras.