Magali

Magali

N°19

La toile d'araignée qui chante

     Il faisait très beau ce jour-là. Je crois que c'était un dimanche après-midi. Magali partit promener au bois, avec papa, maman, et son grand frère Arnaud de huit ans. Son petit frère Julien, qui n'a pas encore un an, accompagnait dans la poussette. La fillette portait sa salopette rouge et des chaussures de toile blanche.

Magali, âgée de quatre ans et demi, a des yeux presque noirs et des beaux cheveux bruns très foncés. Ses parents les lui coiffent en deux couettes, qui dansent le long de son visage.

Arrivée au bois, maman s'assit près de la poussette et lut un livre. Bébé souriait au soleil. Papa joua au football avec Arnaud. Magali se retrouva seule et un peu triste.

Elle s'éloigna doucement. Elle cherchait des myrtilles. Elle adore les myrtilles. Celles que l'on cueille dans les bois sont bien meilleures que celles achetées au magasin.


Un peu plus loin, entre deux branches d'arbre, notre amie aperçut une grande toile d'araignée. Elle était très belle. Les fils brillaient au soleil. Au centre se trouvait une petite araignée, qui ne bougeait pas.

Au même moment, elle crut entendre un léger son, comme celui du vent qui siffle dans les sapins.

Elle écouta mieux. Elle approcha son oreille et entendit, venant de la toile, une très douce musique.

Magali, étonnée, regarda le petit animal.

-Tu sais faire de la musique ?

-Non, répondit l'araignée. Mais je fabrique du fil qui chante.

-Tu as appris à parler? interrogea Magali.

-Oui, mais tends bien l'oreille car je ne parle pas très fort. Tu vois, je suis une araignée différente des autres. Ma toile crée de la musique quand le vent passe au travers.

La fillette souriait.

-Tu as de la chance d'avoir une maison qui chante.

-Oui, ma toile, où j'habite, compose de la musique avec le souffle de la brise.

-Merveilleux, dit Magali.


-Il ne me manque presque rien, expliqua l'araignée. Ma maison me nourrit. Parfois, une mouche ou un moustique vient se prendre dans mes fils. Je le mange. Je bois la rosée qui se pose sur ma toile le matin. C'est si beau, la rosée sur une toile d'araignée. Et, enfin, j'écoute la musique, quand le vent souffle doucement au travers de ses mailles. La seule chose qui me manque, ce sont des myrtilles.

-J'aime bien les myrtilles, affirma notre amie.

-Moi aussi, ajouta le petit animal.

-On en trouve là-bas, dans le bois de sapins, signala la fillette.

-Oui, répondit l'araignée. Mais je ne peux pas m'y rendre. C'est trop loin pour moi. Si je vais jusque-là, je risque de me perdre, et de ne plus pouvoir revenir à ma toile.

-Tu veux que je t'en apporte quelques-unes ? 

-Tu ferais cela pour moi ? Tu es aussi gentille que jolie.

-Attends-moi là, j'arrive.

-Je ne bougerai pas, promit l'araignée. Je vais rester bien installée dans ma toile, au soleil.


Magali retourna vers le bois de sapins. Elle écoutait chanter les oiseaux. Elle entendit aussi son petit frère, qui gazouillait dans sa poussette.

Elle ramassa quelques myrtilles, puis revint en les tenant entre ses mains. Elle les posa sur le sol, au pied de la toile.

-En voici quelques-unes.

-Tu es vraiment mignonne, dit l'araignée. Moi aussi j'aimerais te faire un cadeau.

Écoute ma bonne idée.

-Merci !

-Ramasse le morceau de bois qui se trouve là, par terre, au pied du grand arbre.

Magali se tourna. Elle vit, entre deux racines d'un sapin, une branche d'arbre d'environ vingt centimètres de long. 

-Tiens, s'étonna la fillette, ce bois a une écorce blanche, alors que celle de tous les autres arbres est brune.

-Le bouleau possède une écorce blanche. On en trouve souvent dans les parcs ou dans la forêt, expliqua l'araignée.

Magali saisit la branche de bouleau. Elle la glissa dans la poche de sa salopette.

-Voilà. Quand tu reviendras chez toi, pose ce morceau de bouleau sur le bord de ta fenêtre, à l'extérieur. Demain, quand tu te réveilleras, tu découvriras ton cadeau.

-Merci, dit notre amie. Tu es très jolie et ta toile aussi.

-Je crois que je n'ai jamais vu une aussi charmante petite fille que toi, murmura l'araignée. 

Magali lui fit encore au revoir de la main, puis partit rejoindre papa, maman, et Arnaud, qui l'attendaient près du bébé.


Quand ils revinrent à la maison, notre amie ouvrit la vitre de sa chambre, qu'elle partageait à ce moment avec son grand frère. Elle posa la branche de bouleau sur l'appui de fenêtre.


Le lendemain matin, aussitôt réveillée, elle se précipita pour découvrir sa surprise. Le petit bâton n'était plus couché sur la pierre du bord de la fenêtre. Il tenait debout, vertical. Tout autour, se trouvait un long fil… de toile d'araignée.

-Oh, voilà mon cadeau, s'écria Magali. Du fil qui chante! On pourrait l'accrocher à la fenêtre, Arnaud, comme ça, chaque fois que le vent soufflera, on entendra de la musique.

-Ah non, répondit le grand frère. Je ne veux pas de toile d'araignée supplémentaire dans notre chambre. Il y en a déjà suffisamment derrière le radiateur.

-Mais alors, où allons-nous mettre mon fil qui chante ? demanda Magali.


Papa eut une bonne idée. Il proposa de l'accrocher autour du sapin de Noël qu'on avait planté dans le jardin, après la fête, l'hiver passé.

Toute la famille se reunit autour du petit arbre. Maman déroula délicatement le fil, qui se trouvait autour de l'écorce du bouleau. Papa le fixa comme une guirlande autour des branches couvertes d'aiguilles.

Dès ce jour-là, notre amie eut, dans son jardin, un sapin qui chante. Bon-papa, bonne-maman, les amis et les amies, tous vinrent le voir et l'écouter.

Magali et sa famille le conservèrent longtemps. Un arbre qui chante au vent, c'est merveilleux et rare!


Toi, si tu te promènes un jour dans le bois, que tu aperçois une belle toile d'araignée, ne la casse pas! Tends l'oreille, écoute. Peut-être découvriras-tu aussi une toile dont le fil chante…